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Le Toucher, l’allié essentiel de mon chemin de vie

Ce texte est un témoignage… je vous y livre un peu de mon histoire, de mon parcours pour accompagner vos cheminements personnels comme professionnels sur le rapport au Toucher, au corps, à soi.

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Juliette Grollimund Depoorter, praticienne agréée France Massage

La marque France massage® garantit les services d’un professionnel de confiance, formé selon les normes de la FFMBE. Les praticiens affiliés s’engagent à appliquer des méthodes de massage reconnues et éprouvées. Ils apportent un soin particulier à l’accueil de leurs clients, assurent une prestation adaptée à leurs besoins et respectueuse de leur personnalité. Les conditions dans lesquelles ils exercent s’inscrivent dans les meilleurs standards de la profession.
Les professionnels du réseau France massage, tous adhérents de la FFMBE s’engagent à respecter scrupuleusement le code de déontologie du masseur, praticien en massages bien-être.

Quelques confidences…

Vous êtes nombreux à m’en demander un peu plus sur mon parcours, mon expérience, mon vécu à l’occasion de mes formations, de nos séances ou des conférences que je donne. L’exercice n’a pas été simple pour moi… J’avoue avoir plus l’habitude de faire preuve d’écoute active, d’empathie que de me mettre ainsi un peu à nu.

J’ai entendu que vous livrer un peu plus de mon histoire pourrait vous accompagner dans vos cheminements personnels comme professionnels. Alors, je vous ouvre ici, avec le cœur, quelques temps forts de mon histoire afin de vous témoigner combien les pratiques corporelles dans leur ensemble ont contribué à mon bien-être, mon mieux-être tout au long de ma vie (et c’est bien entendu toujours le cas aujourd’hui !).

En formation, je vous amène souvent à réfléchir sur le fait qu’exercer nos métiers du bien-être, du toucher, de la relation n’a rien d’anodin. A mettre en conscience et au cœur de votre pratique combien c’est toujours le fruit de notre histoire, de notre rapport au tactile qui nous mène là où nous sommes. Je n’échappe pas à cette vérité et, si j’ai choisi en 2008 d’exercer à temps plein mon métier de praticienne et de formatrice, c’est bien en résonance avec mon parcours de vie et les épreuves que j’ai pu traverser. Vous en trouverez ci-dessous un aperçu ci-dessous, dans le respect de la chronologie, l’essentiel m’étant arrivé entre 20 et 30 ans, à l’exception de la toute dernière épreuve, vécue entre 2013 et 2018. En souhaitant de tout cœur que ces confidences contribuent à vous soutenir sur ce chemin, parfois douloureux, souvent long, de mettre votre corps et votre être en lumière.

Article#1 - Chemin de vie

Merci à tous ceux qui m’ont incitée à franchir ce cap de vous parler un peu de moi, de sortir de cette terrible injonction de « vivons heureux, vivons cachés », de la peur du jugement.
Merci infiniment aussi à tous ceux qui sont nommés au long de ces lignes et qui ont contribué à faire de moi ce que je suis aujourd’hui.
Merci à tous mes amis si précieux, mes proches, les thérapeutes qui m’ont accompagnée et m’accompagnent encore pour certains.
Enfin, merci à vous tous, mes clients, mes élèves de me lire, de me suivre depuis tant d’années, de votre confiance en mon travail et de votre générosité au quotidien.

La danse, ma première rencontre avec le massage

C’est à l’occasion de stages de danse estivaux que le massage a commencé de croiser mon chemin. J’avais alors 15 ans et je ne me doutais pas que ces ateliers d’initiation de fin de journée étaient en train d’imprimer une marque indélébile en moi !
Ma pratique de la danse était alors intensive, des années de classique, le conservatoire, la découverte du modern’jazz, des claquettes, la danse orientale, les danses de salon… ce n’était jamais assez ! Je passais une partie de mon été à courir les stages internationaux, dont celui de Châteauroux où je suis allée pendant plus de dix ans. En fin de journée, pour délasser des courbatures et préparer nos soirées à danser encore toute la nuit, un atelier massage. On y apprenait des bases du massages à l’huile, de la relaxinésie, souvent couchés dans l’herbe, allongés sur une simple serviette.

Joël Savatofski animait les ateliers, accompagné sur place de formateurs de son équipe, Janine Bharucha, Denis Bros, Corinne Gaudio, Stéphane Quéry pour les années où j’étais présente.

Par un étrange « hasard » de vie, Janine avait aussi été une de mes profs de danse, de claquettes notamment… premier entrelacement de vie, de réseaux.
Elle habitait non loin de chez ma mère, à Boulogne dans le 92, et animait le week-end, une fois par mois des journées d’initiation. Pendant des années, je m’y suis rendue régulièrement, apprenant sans autre objectif que mon pur plaisir, petit à petit toutes les techniques enseignées par l’IFJS, l’école de Joël Savatofski .

Ça n’était que le début d’une grande histoire d’amour et de vie, mais ça je ne le savais pas encore…

Première expérience corporelle : un accident grave sur la voie publique

J’ai continué de suivre des ateliers, de m’inscrire à des stages, et, à ma pratique de la danse s’est ajoutée celle du yoga de façon hebdomadaire. En stage de yoga, notre prof nous transmettait également des techniques de massage. Je continuais d’apprendre, de faire ma main sans le savoir ! A l’époque le massage n’était pas encore reconnu comme un métier. Nous étions un bon groupe à Paris, plutôt bons vivants, plutôt ancrés dans le corps et toujours prêts à mettre le massage bien-être en lumière : masser dans le métro, dans les grands magasins, dans les parcs à Paris, pas de limite à l’imagination !

Mes études me prennent alors temps et énergie, après deux ans de prépa HEC, j’intègre une grande école, je commence à travailler, je voyage… la danse et le massage ont toujours une place plus que privilégiée au sein de mes loisirs. Mes compétences m’amènent à conduire une étude statistique pour Joël et son école : elle donnera lieu à un article publié dans un ouvrage collectif et à une prise de parole introductive au congrès du Toucher-massage. Sur les conseils de Janine, je suis les cursus de formation de l’IFJS sur mes temps libres, car comme elle me dit à l’époque : « on ne sait jamais, tu as déjà quasi toutes les techniques en main, ça pourrait te servir d’avoir ton attestation de formation ». C’était le début de ce qui deviendra une grande aventure de vie avec l’IFJS pendant plus de 20 ans.

A la fin de mon cursus de formation, Joël, un brin visionnaire me tape sur l’épaule en me disant : »de toute façon, tu finiras formatrice chez nous ».
A l’époque, mes études me font projeter des hauts postes en entreprise, cette perspective me fait sourire, je l’entends, avec une grande tendresse.

En fin de première année à l’Edhec en 1995, veille de mes partiels, pour se récompenser d’une bonne journée de révision avec une amie, on décide d’aller dîner en centre-ville et de se faire un ciné. Sur le chemin du retour, ma vie s’arrête.

Renversée par une voiture alors que je traversais, au feu, bien comme il faut, sur un très grand boulevard de Lille, je fais 13 mètres de vol plané. Perte de connaissance initiale, bassin cassé à droite (fracture ischio-pubienne), épaule en miettes à gauche (poly fractures de la tête humérale). Deux mois d’hospitalisation, de maison de convalescence à Lille puis je rentre à Paris en fauteuil roulant où je découvre les joies de la vie en situation de handicap, de la dépendance au quotidien – ne plus se laver seule, s’habiller, se déplacer, manger… Depuis que mon bassin est assez consolidé, j’ai dû apprendre à me re-lever et surtout à re-marcher. Curieuse et violente expérience à une vingtaine d’années que de redécouvrir le réflexe de marche, accepter de tomber, se relever, reprendre confiance dans ses jambes… surtout avec un bras en écharpe ! Trois opérations de l’épaule, six mois d’immobilisation de mon bras, un an de rééducation quotidienne pour retrouver une pleine mobilité.

J’ai eu le temps de ressentir au cours de cette épreuve quelques bases de mon anatomie « de l’intérieur », d’identifier les trajets de muscles dont j’ignorais même l’existence, de mesurer les progrès que la kinésithérapie quotidienne me permettait d’accomplir, mais aussi de l’incidence du lien affectif, de l’écoute, de la relation de confiance et de l’empathie de l’incroyable équipe qui m’a remise sur pieds de 17h à 19h, 5 jours sur 7 pendant près d’un an, au centre de rééducation.
Certains des kinés de l’équipe massaient, et ça me faisait tellement de bien. J’en oubliais même pendant quelques minutes ce bras qui me faisait si mal. J’en retrouvais les contours, j’entrevoyais les bribes d’une possible relation d’amitié avec cette partie de mon corps que je finissais par ne plus habiter pour en fuir les inconforts et les douleurs constantes.

Le massage prenait tranquillement sa place dans ma vie, en ressentant ses immenses bienfaits, mais je ne mesurais pas encore à quel point.

Deuxième épreuve : un cancer dans une localisation rare

Loin d’imaginer à l’époque qu’un jour je le formulerais ainsi… alors que j’étais au cœur de cette épreuve déjà physiquement lourde à digérer à un âge où l’on se sent tout-puissant, cet accident m’a en réalité sauvé la vie, au sens propre du terme. J’imagine parfois, avec un sourire intérieur non dissimulé, la tête que ferait l’homme qui nous a renversées mon amie et moi et a préféré opter pour le délit de fuite en première option (paniquant sans doute devant la gravité de la situation) si je le rencontrais un jour et que, des années après, je le remerciais au lieu de l’insulter !

Au cours de cette longue année de rééducation quotidienne, une boule de la taille d’un bel abricot est apparue un jour, positionnée à la hauteur de mon sternum. Un peu surprise, j’en parle au médecin qui me suit au centre et intrigué lui aussi, il m’envoie faire des radios. Je commence par me rendre à trois pas de chez moi dans ma rue pour faire des clichés rapides. Guère convaincu par l’imagerie que je lui présente en retour, il m’envoie vers un de ses amis, un radiologue de grande qualité. Les premières radios font très vite suite à un scanner, une IRM, une scintigraphie… Je crois avoir expérimenté à l’époque tous les dispositifs d’imagerie disponibles sur le marché, avec et sans injection de produit de contraste ! Le diagnostic n’est pas encore clair, en revanche, il est évident que je glisse doucement vers une nouvelle épreuve de taille. Aux clichés font suite les biopsies… c’est une tumeur, pas de doute. Reste à définir si elle est bénigne ou maligne pour envisager les suites de traitement. J’expérimente donc les joies de la biopsie à l’aiguille avec multiples prélèvements (rien que de l’écrire, mon corps se tend au souvenir des sensations et de la douleur malgré l’anesthésie locale), dont les résultats impliquent une biopsie en coupe sous anesthésie générale pour compléter l’analyse. Le verdict tombe : chondrosarcome du manubrium sternal. Je continue mon apprentissage forcé de l’anatomie ! C’est un cancer très rare, qui arrive généralement plutôt en fin de vie… Après avoir été le « cas clinique de Juliette G » en congrès de traumatologie mon chirurgien de l’épaule ayant mis en œuvre une technique expérimentale sur moi pour m’éviter une prothèse à vie, je devenais un « cas clinique » exceptionnel au sein de l’Institut Gustave Roussy. Je bénéficie d’une équipe incroyable pour m’accompagner dans cette nouvelle épreuve de vie. La tumeur se révèle bénigne, j’aurai donc « juste » droit à une intense chirurgie thoracique, mais j’évite la chimio, la radiothérapie, c’est déjà ça. Une autre bonne nouvelle, seul le tissu cartilagineux est cancéreux, à quelques millimètres, il s’étendait à l’os… et si ça avait été le cas, je ne serais plus de ce monde aujourd’hui pour vous partager mon expérience.

L’accident m’a donc sauvée ayant permis de révéler ce cancer qui me grignotait doucement, sans doute depuis ma tendre enfance, sans aucun symptôme apparent ! A peine remise de l’accident, je repars donc pour une nouvelle aventure où cette fois, il me sera proposé par l’existence de ré-apprendre à respirer. Je vous passe les détails de l’opération… les journées en réanimation sous haute dose de morphine me font expérimenter un certain nombre de sorties de corps, la cicatrice de 22 cm découverte quelques temps après mon réveil entre mes seins et ses incidences sur ma plastique, mon rapport au corps, mon image de Soi sera une épreuve en elle-même, totalement incomprise par mon chirurgien uniquement centré, à juste titre aussi, sur le fait qu’il m’avait sauvé la vie. J’expérimente, du fait de mon jeune âge, un nouveau type de prothèse souple qui vient d’arriver sur le marché et doit permettre une meilleure intégration de ce corps étranger.

Me voilà donc dans une enveloppe dotée de caractéristiques peu courantes : mes clavicules et mes côtes du haut sont flottantes.

Objectifs suivants : la prothèse doit prendre sa place, et ma respiration doit retrouver de l’amplitude et des cycles réguliers. C’est la pratique du yoga et notamment des pranayamas, les techniques de respiration, qui seront à la base de toute ma rééducation. Également, de longs massages de la face avant accompagnés de larmes pendant des heures qui me permettront de retrouver, avec le temps, un lien avec ce corps que je n’habite plus, qui me fait mal, qui peine à respirer, qui est devenu un étranger sur lequel je ne peux plus prendre appui ni compter.

A cette époque, je reprends progressivement une vie « normale » et le cours de mes études. Je pars en échange universitaire aux HEC Montréal (eh oui, au Québec on étudie aux Hautes Études Commerciales et non à l’école HEC comme en France !) et à mon retour, je complète ma formation avec un 3e cycle à Paris VIII, puis, je rentre progressivement dans la vie active.

Le massage reste un loisir, je continue de me former pour le plaisir, de masser régulièrement mes proches, mes amis, quelques amis d’amis lorsque j’en ai l’occasion et surtout, de participer à tous les événements mis en œuvre par l’ASMBE (association au soutien du massage bien-être) à Paris pour faire signer des pétitions contribuant à la reconnaissance du massage bien-être. J’ai retrouvé une forme d’équilibre et je vis aussi pleinement que possible ma vie active de jeune femme parisienne dans un corps toujours un peu meurtri mais dont la jeunesse me permet de rebondir.

Troisième obstacle : reconstruire l’image de soi et le féminin blessé

Me voilà donc guérie, soignée, réparée… sauvée !
A en écouter le corps médical, mes proches, tout va bien dans le meilleur des mondes, les épreuves sont derrière moi, il ne me reste plus qu’à vivre, en profiter, oublier tout ça, retrouver l’énergie de la vingtaine et de la jeunesse qui n’a pas de limite.

Sauf qu’au creux de moi, cela ne se passe pas vraiment comme ça.
Réapprendre en deux ans à marcher puis à respirer, d’accord, c’est une renaissance symbolique, c’est intéressant sur tous les plans et c’est une expérience de vie incroyable. Mais à court terme, je dois surtout reconstruire mon rapport au corps et ça n’est pas simple.

D’un corps allié dans lequel j’avais l’habitude de vivre, d’un corps souple et musclé par la danse, d’un corps que j’aimais et dont je trouvais les courbes plutôt féminines et harmonieuses, il me faut faire le deuil. Je dois, non pas je peux, je dois car c’est ma nouvelle enveloppe et « je peux déjà être heureuse d’être en vie » comme on le répète souvent à juste titre, me suffire désormais de ce corps en qui je n’ai plus confiance, de ce corps que je trouve défiguré de cette balafre à l’époque rouge et tuméfiée, de cette prothèse qui se met parfois dans une position qui me crée des douleurs incroyables et bloque ma nouvelle respiration dite « paradoxale », de ce corps qui m’oblige à redéfinir tous mes mouvements du quotidien… enlever un pull, choisir des vêtements, des bijoux dont je supporte le contact, ne plus rien porter (pas même une bouteille bras tendu pour servir un verre), renoncer à tous les passages au sol dans ma pratique de la danse et du yoga, aux appuis sur les bras quand je fais l’amour.

Ces deux épreuves s’invitent doucement dans ma vie quotidienne et me font expérimenter ce « handicap que l’on ne voit pas », celui qui crée cette difficulté relationnelle où ceux qui vous connaissent et savent oublient peu à peu et font au quotidien « comme si » ça n’avait jamais existé, et où ceux qui ne vous connaissent pas ne peuvent pas savoir, n’ont pas à savoir et formulent régulièrement, sans aucune mauvaise intention, des demandes qui ne peuvent être satisfaites. C’est tellement difficile d’alterner intérieurement selon les situations entre la posture de victime qui met au centre de l’attention mais  fait naître un regard de pitié, la posture de guerrière/super héros qui a triomphé de l’épreuve, la posture du déni confortable aussi à ses heures…

S’en vient alors une longue période difficile de décompensation, de repli, de fermeture, d’isolement, de non envie. Un temps d’introspection essentiel sans doute aussi, mais vécu comme un rapport de force. Il est au final moins douloureux de me mettre en veille que de me confronter au regard des autres, aux questions qui en soi n’ont rien d’indiscrètes mais dont les réponses dérangent parfois… et réveillent en moi la blessure.

Je me sens vivante mais si profondément blessée, meurtrie. Je ne sais plus où sont mes frontières, comment me positionner avec ce corps que j’habite si douloureusement. J’alterne des périodes d’abstinence sexuelle et relationnelle et des rencontres éclair, la relation m’est devenue trop difficile, je ne veux plus me livrer, j’ai du mal à me « montrer », à assumer ce que j’ai traversé et les cicatrices qui en résultent.

Mon féminin peine à vibrer, je n’aime plus mon corps, une partie de moi lui en veut, une partie en est fière aussi. Ma pratique du yoga et de la danse me sont essentielles. Ce sont finalement les seuls instants, à l’occasion d’un cours, d’un stage ou lorsque je danse des nuits entières où j’en oublie mon corps du moment, où je me sens « comme dans mon corps d’avant »… jusqu’au mouvement imprévu où la douleur me rattrape, la limite se fait sentir.

C’est une période où je m’ouvre aux enseignements de Mantak Chia, de Margo Anand-Naslednikov et de tant d’autres, où j’aspire à une sexualité différente, vibrante, connectée, sacrée. Je rencontre à cette période certains êtres qui ont contribué de façon essentielle à la femme que je suis aujourd’hui. Nous partageons cette recherche, ces lectures, ces aspirations qui nous animent.

C’est aussi une époque où j’organise ma vie en alternant des périodes de travail intense en free-lance et des longs voyages. Je parcours l’Asie, me rend plusieurs fois en Inde. A l’occasion d’un voyage qui me mènera également en Birmanie avec mon compagnon de l’époque, je suis amenée à vivre une nouvelle expérience forte de ma vie de femme : enceinte depuis peu, je fais une fausse couche spontanée à Bénarès en 2003. C’est une épreuve terrible que les Indiens me proposent de considérer sous un angle nouveau : j’ai libéré une âme à Varanassi, c’est le rêve de tous de venir y achever leur cycle de réincarnations. J’accueille l’idée, mais je rentre en France émotionnellement dévastée.

Mon rapport à mon corps est loin d’être simple et stable. Je me reconstruis et me détruis, je me cherche, j’explore ce que la vie me propose, je me laisse un peu porter par les rencontres, les expériences. J’alterne entre des phases exaltées et des moments de chaos intérieur. Je goûte à l’amour dans ce qu’il a de plus sacré et me sens parfois comme une terre brûlée dont il ne reste plus rien en surface mais qui travaille en souterrain à une renaissance.

Au cœur de ce chaos, sans le savoir, j’ouvre la porte d’une future expérience, un nouveau trauma que je vivrai quelques années plus tard : l’agression par un « copain » au nez trop chargé de coke, sous forme de rapport non consenti. Il me faudra de longues années pour être capable de qualifier cet acte pour ce qu’il était, un viol. #MeToo.

Quatrième marche : un burn-out pour passer le cap et oser me choisir

Il en va des épreuves comme de tout ce que nous traversons, pour citer Léo Ferré : « Avec le temps, avec le temps va, tout s’en va… »
Les années passent, la vie professionnelle se construit, le quotidien se remplit, les cercles d’amis se forment, la vie matérielle s’organise et peu à peu, je rentre dans un rythme, une forme de routine où « tout va bien ».

Amenée à enseigner au sein de différentes écoles de commerce, de communication, de journalisme depuis déjà plusieurs années, je mène ma vie de free-lance entre des activités de rédactionnel, de conception, des missions de conseil et les cours que je donne. Je bénéficie d’une immense liberté tirée de l’organisation de mon temps de travail, je travaille selon l’inspiration du moment le jour ou la nuit, je vis mes passions, mes loisirs le reste du temps.

Je ne mesurais pas à l’époque combien me sentir libre de mon temps m’était essentiel… jusqu’au jour où j’accepte de signer un CDI, le profil de poste, le salaire, les conditions proposées me faisant miroiter une étape de ma réalisation professionnelle que je pensais ne pouvoir laisser passer. Je me suis laissée happer par l’ampleur de la mission, je l’ai prise à bras le corps au-delà du raisonnable, je m’investissais de 6h du matin à parfois 23h, sans mettre en conscience que je courais après une quête incessante de reconnaissance. Je n’avais plus de vie, plus de loisirs, je me sentais incomprise, non considérée à la hauteur du travail rendu.

Il me faudra une convocation à la médecine du travail pour ouvrir les yeux sur l’état dans lequel j’étais rendue et que je ne mesurais pas. Je suis arrêtée sur le champ. Verdict : burn-out. Survie : se mettre au vert, quitter Paris, couper avec tout environnement stressant en lien avec le travail. Du repos !

Me voilà donc une nouvelle fois confrontée par l’existence. Il m’en aura fallu des épreuves pour comprendre que je n’étais pas sur mon chemin de vie !

Je pars en Bretagne en 2005, me poser, me reposer, me reconstruire. J’y découvre un mode de vie qui n’a rien en commun avec ma vie parisienne ! Je renoue doucement les mois passant avec ma pratique du massage, je propose des séances, je mets en place des ateliers d’initiation et j’interviens régulièrement dans le cadre scolaire auprès d’enfants et d’adolescents.

N’ayant jamais cessé ma pratique du yoga, je prends des cours hebdomadaire dans une école… qui lance une année un cursus unique de 3 ans de marma thérapie, une discipline relevant de l’ayurveda recouvrant du massage, du yoga, une approche de l’alimentation, des plantes. Cette formation me reconnecte en profondeur à ce que je suis en fait depuis toujours.

Ma fille nait en 2007. En 2008, je décide de créer KerAnanda dont le nom est à l’image de ce lien tissé dans ma vie entre l’Inde et ma pratique du yoga et la Bretagne, devenue si essentielle à mon équilibre.

L’activité de mon cabinet se développe, les ateliers et les événementiels également. Une école de formation en massage ouvre à Saint-Brieuc et me propose de faire partie de l’équipe pédagogique. Toujours en lien avec l’IFJS, j’en fais part et Jacqueline Thonet, la directrice pédagogique et une grande amie. Elle m’invite plutôt à suivre la formation de formateurs de l’école, en 2 ans.

C’est ainsi que la prédiction de Joël se réalise… je deviens formatrice pour l’IFJS !

Je prends progressivement la responsabilité des modules déjà existants à Nantes, j’en crée à Rennes. J’interviens également régulièrement à Paris et parfois, à la demande d’établissements hospitaliers, en Normandie ou d’autres régions proches.

Le massage a désormais pleinement pris sa place dans mon quotidien, ma vie de formatrice atteint une vitesse de croisière.

Mon quotidien : accompagner le bien-être et le corps traumatique

Le massage, l’accompagnement corporel sont désormais mon quotidien à temps plus que plein ! J’accueille en séances individuelles les adultes (H/F/femmes enceintes), adolescents, enfants et bébés. Je forme les professionnels en activité qui souhaitent enrichir leurs pratiques de compétences complémentaires, comme ceux qui initient un projet de reconversion professionnelle. J’anime des ateliers tous publics pour ceux qui souhaitent masser à titre familial et amical. Je forme également les soignants qui souhaitent intégrer des gestes de massage au cœur de leur quotidien de soins, de gestes d’hygiène, d’accompagnement relationnel. En plus des modules de l’IFJS, je crée mon propre programme de formation au sein de KerAnanda.

En 2019, je deviens autrice avec la parution de mon premier livre, chez Hatier, Être zen pour mieux apprendre. J’ai l’immense privilège d’être invitée à des conférences sur le sujet des bienfaits de la détente en classe, de l’apport du bien-être pour faciliter les apprentissages, la mémorisation, la concentration en classe de primaire.

Dans le cadre de mon évolution personnelle, je continue de me former chaque année à une technique corporelle qui vient, soit enrichir mes propositions en séance au cabinet, soit nourrir mon être, soit trouver une application directe dans mon activité de formatrice ou de praticienne. J’ai ainsi eu la chance de me former aux côtés de Christian Hiéronimus, de découvrir la Trame, la Guidance informationnelle et quantique, Access Bars, le Chi nei tsang et plus récemment, le massage sonore aux bols tibétains.

Je me forme également à l’ingénierie pédagogique, à l’incontournable digitalisation et vous propose depuis deux ans des modules en e-learning en partenariat avec la plate-forme de formations en ligne partenaire de la FFMBE, En Mode Pro.

Cet épanouissement de ma pratique professionnelle s’est fait en parallèle de ma dernière et finalement, plus grande épreuve jamais traversée au cours de mon existence. Elle m’a amenée à me documenter, me former, m’instruire et vivre la réalité de l’accompagnement traumatique des victimes de violence et notamment, de violences sexuelles de la révélation des faits au dépôt de plainte, de la confrontation à la justice au cours de 5 années de procédure civile et pénale, des incidences relationnelles de porter la parole qui dérange, de se confronter au tabou. A l’époque du viol, comme tant de victimes, je n’avais pas porté plainte ni confronté d’agresseur. Là, dans cette nouvelle posture d’accompagnante de mineure abusée, aucun autre choix possible.

Au cœur de ma pratique depuis des années déjà, j’accompagne de nombreuses personnes, hommes et femmes, vivant dans un corps parfois traumatisé et encore traumatique. Certains parfois ne supportent pas, ne supportent plus d’être touché, que ce soit sur la totalité du corps ou seulement certaines zones. Certains ne sentent plus rien ou n’ont jamais rien senti, ni même le froid du chaud. Certains vivent « hors » de leur corps comme des plantes poussent hors sol.

Le traumatisme vécu n’est pas toujours le fruit d’un abus. Certaines femmes, par exemple, gardent des séquelles de leur accouchement telles qu’elles ne parviennent pas à se réapproprier leur corps. Des couples vivent aussi des années entières sans plus se toucher.

Forte de mon expérience de vie dont ces épreuves ont nourri mon empathie, mon écoute en séance de ce que vous traversez corporellement et émotionnellement, des techniques que je pratique et que j’enseigne au quotidien, de ma vie si heureuse aujourd’hui aux côtés d’un homme merveilleux que j’aime, de nos enfants et d’amis exceptionnels, je vous accompagne à cheminer, parfois en lien avec d’autres professionnels de confiance avec qui je travaille en réseau, tout au long de votre processus de réparation.

Il prend souvent du temps, il n’est jamais linéaire, mais j’en suis la preuve vivante, on survit à tout… puis on revit… et on vit !

Mon parcours de vie a placé le bien-être au cœur de mon existence. Bien-être qui m’a permis de cheminer vers mon mieux-être et m’amène aujourd’hui à rechercher, dans le présent de l’instant, à être bien, dans mon corps, dans mon cœur et dans ma tête. Mais cela ne signifie pas que j’y parviens toujours !
Être en relation avec Soi est loin d’être aisé, aimer son corps et l’habiter non plus et ce n’est pas un acquis immuable… mais ils me semblent des préalables essentiels à la relation avec l’Autre, que ce soit son conjoint, ses enfants, ses proches, ses amis, ses collègues comme ses clients.

Chaque épreuve est l’occasion de découvrir une force cachée, d’accéder à une partie de Soi qui ne demande qu’à se révéler… pour ensuite mieux la partager.  C’est notre histoire de Vie qui fait de nous ce que nous sommes, comme parents, comme amis, comme professionnels. A l’image d’un terreau, d’un compost, nous assimilons et nous nous appuyons sur notre expérience pour semer, faire pousser, transformer… et parfois, ce qui germe met tant d’années à se révéler qu’on avait même oublié ce qu’on avait planté initialement !

Une blessure, un traumatisme s’installent parfois pendant de longues années, alors, soyons patients, bienveillants avec nous-mêmes. Apprenons à lire les messages que le corps nous envoie, à accueillir ses besoins, ses compensations, à les aimer. Mon corps par exemple, après toutes ces épreuves, a cuirassé en prenant 20 kg, une façon bien à lui de mettre du rond dans ma vie, pour prendre moins de coups peut-être. Je ne vous dis pas que je l’accepte chaque jour avec le sourire, ni que je l’aime toujours, mais je comprends cette transformation, je cultive autant que possible un rapport d’amitié avec et je mène en séance, en supervision le travail de réparation, de mise en lumière nécessaire pour un jour, ne plus avoir besoin de cette armure.

En tant que thérapeute, praticien, il est incontournable de poursuivre tout au long de notre activité un travail sur Soi, une supervision de pratiques.

Avec tout mon amour et ma lumière.


« Le Toucher, le sens essentiel de ma vie »

— Juliette Grollimund Depoorter

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