Dans cet article, nous explorerons pourquoi et comment intégrer des approches corporelles simples pour favoriser un climat scolaire serein et propice à des apprentissages solides.
Le stress : un frein invisible aux apprentissages
- Le stress, réponse naturelle de l’organisme face à une menace, est une force à double tranchant. Bien qu’il puisse, à faible dose, stimuler la vigilance et l’action, un stress chronique agit comme un frein. Chez les enfants, il peut se traduire par des difficultés d’attention, une irritabilité accrue ou une capacité limitée à traiter des informations complexes.
- En classe, les manifestations du stress sont souvent mal interprétées : agitation, fatigue apparente, désengagement ou encore opposition sont parfois vus comme des problèmes de discipline. Pourtant, ces signes traduisent souvent un déséquilibre dans l’état émotionnel et physiologique de l’élève.
La détente : un puissant outil de régulation
- Contrairement aux idées reçues, la détente ne se résume pas au repos. Elle est une démarche active et consciente. Elle stimule le système nerveux parasympathique, celui qui favorise le retour au calme, et réduit l’impact du cortisol, l’hormone du stress. Dans un environnement scolaire, elle agit comme une clé pour rétablir l’équilibre interne des enfants, les rendant plus disponibles pour apprendre.
- Intégrer des moments de détente en classe peut sembler contre-intuitif dans des journées déjà bien remplies. Pourtant, ces pratiques prennent peu de temps et offrent des bénéfices immédiats : meilleure concentration, diminution des tensions, et un climat apaisé pour l’ensemble du groupe.
Pourquoi le corps est central dans les apprentissages ?
Dès leur plus jeune âge, les enfants explorent le monde par leurs sens. Le toucher, en particulier, est leur premier langage, celui par lequel ils découvrent et structurent leur environnement. Pourtant, à mesure qu’ils grandissent, le rapport au corps devient cloisonné : le sport, les soins médicaux ou l’hygiène sont souvent les seuls cadres où le corps est mobilisé consciemment.
À l’école, on demande aux élèves de rester immobiles et concentrés pendant de longues périodes, ce qui va souvent à l’encontre de leurs besoins naturels de mouvement et d’expression. Ce décalage peut générer frustration, fatigue et désintérêt. Réintégrer le corps dans les processus d’apprentissage permet non seulement de répondre à ces besoins mais aussi de renforcer les capacités cognitives par une meilleure gestion de l’attention, de l’engagement et de la mémorisation.
Des pratiques corporelles simples et efficaces

1. Étirements pour relâcher les tensions
Les tensions musculaires peuvent freiner la circulation sanguine et l’oxygénation du cerveau, indispensables pour rester alerte. Introduire des étirements simples en classe peut transformer l’énergie des élèves en quelques minutes. Par exemple :
- Étirement des bras : demander aux élèves de « toucher le plafond » en allongeant les bras au maximum.
- Rotation du buste : assis ou debout, inviter les élèves à tourner doucement d’un côté, puis de l’autre.
- Détente des épaules : effectuer des roulements vers l’avant et l’arrière pour relâcher la zone souvent tendue.
Ces exercices, pratiqués régulièrement, favorisent un état de vigilance corporelle et mentale.

2. Respirations guidées pour retrouver la clarté mentale
La respiration est un outil puissant pour agir directement sur le système nerveux. Une technique simple et ludique est la respiration en carré :
- Inspirer sur quatre temps.
- Retenir l’air dans les poumons pendant quatre temps.
- Expirer sur quatre temps.
- Rester poumons vides pendant quatre temps.
Ce cycle, répété quelques fois, aide les élèves à se recentrer et à calmer leurs émotions. Des variantes peuvent être proposées, comme la respiration « ballon » où l’on imagine que le ventre se gonfle à l’inspiration et se dégonfle à l’expiration.

3. Automassages pour mieux habiter son corps
La respiration est un outil puissant pour agir directement sur le système Les automassages sont une manière ludique et accessible de reconnecter les élèves avec leurs sensations. En travaillant sur des zones comme le crâne, le visage ou les mains, ils relâchent les tensions accumulées et améliorent leur schéma corporel. Quelques idées :
- Pour le visage : masser doucement les tempes en petits cercles ou tapoter légèrement le contour des yeux pour soulager la fatigue visuelle.
- Pour les mains : presser chaque doigt entre le pouce et l’index de l’autre main, en alternant.
Ces exercices ne nécessitent aucun matériel et peuvent être pratiqués en toute autonomie.

4. Jeux corporels pour canaliser l’énergie
Pour les moments où l’énergie déborde, des jeux comme « la télécommande des émotions » permettent à la fois de décharger les tensions et d’apprendre à identifier ses émotions.
Chaque élève choisit une émotion, la mime puis la change comme s’il actionnait une télécommande. Terminer sur la Joie est essentiel pour laisser l’enfant sur une note positive de réguler ses trop-pleins émotionnels.
Une pédagogie du bien-être
Les bénéfices concrets en classe
Intégrer ces pratiques dans la journée scolaire offre des résultats tangibles :
- Consolidation des apprentissages : La détente favorise une meilleure mémorisation en stimulant la plasticité cérébrale, comme le souligne Stanislas Dehaene dans ses recherches.
- Amélioration de l’attention : Les élèves, en s’étirant ou en respirant profondément, reprennent contact avec leurs sensations et retrouvent une posture attentive.
- Meilleure gestion émotionnelle : Ils apprennent à reconnaître et canaliser leurs émotions, évitant ainsi les débordements qui perturbent les apprentissages.
Pour que ces pratiques portent leurs fruits, il est essentiel de les intégrer dans une démarche pédagogique cohérente.
Quelques conseils pour les enseignants :
- Encourager la participation active : Les élèves doivent comprendre qu’ils sont acteurs de leur bien-être et non de simples récepteurs passifs.
- Créer des routines : Proposer des exercices à des moments précis de la journée, comme un étirement collectif avant une leçon ou une respiration guidée après la récréation.
- Adapter les activités : En fonction de l’âge et des besoins du groupe, varier les exercices et les rendre ludiques pour capter l’attention des élèves.
EN CONCLUSION… réenchanter l’apprentissage par le corps
- Dans une société où l’on valorise souvent la performance et la rapidité, remettre le corps au cœur des apprentissages scolaires est une révolution douce mais nécessaire. Ces pratiques, loin d’être une perte de temps, sont un investissement précieux pour le bien-être des élèves et des enseignants.
- En intégrant des rituels corporels simples, les écoles offrent aux enfants un cadre plus serein, où ils peuvent apprendre avec plaisir, confiance et engagement. Un enfant qui se sent bien dans son corps est un élève qui s’ouvre à la joie d’apprendre.

« Le Toucher, le sens essentiel de ma vie »
— Juliette Grollimund Depoorter —